Eminem - MMLP2 [Album Review]

Cela fait deux jours que le nouvel album d'Eminem a leaké, soit moins d'une semaine avant sa sortie officielle (le 5 Novembre). Inutile de se voiler la face, le Eminem de My Name Is, The Real Slim Shady, Lose Yourself, Mosh, Never Enough, Shake That, One Last Time, Crack A Bottle et Beautiful est bien loin, on l'a compris. Cela fait quelques temps que l'on sait que MMLP2 ne sera pas le digne successeur de The Marshall Mathers LP premier du nom, qu'il ne recréera pas le son Hip-Hop des grandes années du rappeur, et qu'il sera du même acabit que Recovery.
Ce dont on ne se doutait pas, c'est qu'il serait pire. En effet, cette fois, rien n'est à sauver. Dr. Dre n'est nulle part à la prod pour illuminer l'album d'une pépite telle que So Bad (monsieur se contente seulement d'être producteur exécutif et on se demande encore comment il a oser valider ça - ah oui parce que ça va rapporter gros...). Pas non plus de Talkin' 2 Myself, de Going Through Changes ou même de Not Afraid. Tout l'opus n'est que Pop, Rock, Folk, voire même Electro ou Country - avec du Rap par dessus, oui. Mais aucune instru Hip-Hop, et, plus grave, quasiment aucune instru potable. [Stream de la version standard deluxe ici].
A l'image des singles, les prods oscillent entre grinçant (Rap God), bruyant (Asshole), assourdissant (Berkerk), brouillon (Survival), gnangnan (Stronger Than I Was), recyclage sans inspiration (Rhyme Or Reason), ultra-générique (The Monster), démodé (So Far...), hors-contexte (Wicked Ways), impossible à écouter en entier (Desperation) et blague auditive (Love Games). Seules Bad Guy (la première partie seulement), So Much Better (minus le refrain), Legacy, Brainless, Evil Twin (sans doute la meilleur de l'album) et Baby (édition deluxe) ne sont pas mauvaises.

Je m'attarderai simplement sur Legacy car, bien que très Pop, je l'ai beaucoup appréciée. C'est mon coup de cœur de l'album. Pourquoi ? Elle est tout ce que l'agaçant Love The Way You Lie aurait du être. Certes, ce n'est pas ce qu'on attend d'Eminem. Mais quitte à faire un son Pop aux refrains interprétés mélancoliquement par une voix féminine et aux couplets rappés, autant qu'elle soit bien produite. C'est le cas ici. Le doux piano est agréable et la mélodie des refrains est très belle. Ceux-ci ne sont pas lassants, et surtout, ils s’intègrent très très bien. Du travail de professionnel. On est loin de Love The Way You Lie alors que la construction est la même.
Alex Da Kid devrait prendre exemple sur Emile Haynie. Ce dernier est d'ailleurs loin d'être un amateur. Excellant aussi bien dans la Pop que Rap, il a collaboré avec talent avec Lana Del Rey, Natalia Kills, Kanye West, Kid Cudi, Ice Cube ou Tinie Tempah. Au souvenir de ces travaux de qualité, il n'est donc pas étonnant qu'il ait continué dans cette voie.
Cependant, il est clair que Legacy n'aura jamais le quart du succès de Love The Way You Lie, et ne sera pas exploité en tant que single. Tout simplement parce qu'il n'y a pas Rihanna, mais une voix féminine non créditée. C'est The Monster qui sera un énorme tube. Tellement dommage.

Point positif tout de même : bien que l'album manque de cohérence avec toutes ses tracks différentes, elles s'enchainent toutes très bien et on peut finalement parler d'une grande cohésion au sein de cet opus où rien ne détonne par rapport au reste. Que les sons soient mauvais est une autre histoire.

Entre déçus et trahis, de multiples voix s'élèvent déjà chez les fans de Hip-Hop, mais pourquoi Eminem s'en inquiéterait-il ? On sait déjà que le succès sera encore au rendez-vous, aussi conséquent qu'avec Recovery. Il est vrai qu'avec une telle reconnaissance mondiale, il pourrait se permettre un son moins consensuel tout en vendant au moins autant qu'il y a 10 ans. Mais il semble que le succès facile lui soit trop monté à la tête. S'il n'a que 41 ans, il ferait peut-être mieux de prendre sa retraite ! Mais ça ne risque pas d'arriver.

Bonus : tous les crédits de MMLP2 sont désormais rendus publics à cette adresse.