Après un excellent premier album auto-produit, Russ enchaîne les productions de Scott Storch

Avec une douzaine de mixtapes à son actif - sorties entre 2011 et 2014, Russ n'est pas nouveau dans l'industrie de la musique. Pourtant cela fait seulement un an et demi qu'il a commencé à percer. What They Want puis Losin Control et enfin Pull The Trigger lui ont permis de gagner en notoriété et les deux premiers lui ont même valu d'entrer au Billboard Hot 100 (respectivement #62 et #83).
Après 10 années d'indépendance la plus totale pendant laquelle il a développé tranquillement sa fanbase, ce jeune artiste aujourd'hui âgé de 25 ans a signé un deal avec Colombia Records à la fin de l'année 2016. S'en est suivi en Mai 2017 l'album There's Really A Wolf, son tout premier opus aujourd'hui écoulé à 500 000 exemplaires après un démarrage en 7ème position au Billboard 200. Même pour cette grosse sortie, le natif du New-Jersey d'origine sicilienne et basé à Atlanta est resté fidèle à sa philosophie première : le "Do It Yourself". Il a en effet été le seul artisan de ce projet, pour lequel il endosse les casquettes de rappeur-chanteur, auteur-compositeur, producteur et producteur exécutif.

Le résultat est excellent, combinant qualité et quantité puisqu'il contient 20 morceaux et aucun déchet (ce qui n'est pas donné à tout le monde, pas même à Drake sur More Life) ! Difficilement classable dans une seule catégorie, il est le fruit d'influences très variées et donne autant dans le Trap Rap, que le Neo-R&B, la Pop. Balade Pop/Soul au piano (I Wanna Go Down With You), démonstration d'un beau falsetto (le délicat et charmant Cherry Hill), mid-tempo R&B ultra planant (Act Now, Family First, Losing Control, Scared), Pop-Rap délicieusement mélancolique (Back To You) ou enjouée (l'adorable Don't Lie), rap sombre aux basses plus ou moins marquées (What They Want, Pull The Trigger, le très catchy Do It Myself), banger ultra accrocheur (Me You)... Dotées de sonorités très actuelles, les tracks s’enchaînent et les ambiances diffèrent grandement sans que cela soit dérangeant, avec pour fil conducteur un très beau timbre de voix dont on s'éprend rapidement, et surtout une mélancolie, assez fascinante présente même même lorsque le morceau est totalement dénué de tristesse. Mention spéciale pour la petite bombe Me You qui se détache dès la première écoute et à laquelle il est impossible de résister.

Et puis soudain, en plein de mois de Septembre, celui qui a toujours produit ses morceaux a mis en ligne pas moins de 4 chansons estampillées Scott Storch.
Si le nom de Russ ne peut parler à tout le monde, c'est loin d'être le cas de celui du producteur star de la première moitié des 00's. Qui n'a pas écouté en boucle les énormes bombes Still D.R.E., Can't Hold Us Down, Lean Back, Candy Shop, Run It, Gimme That, Let's Ride... Que des pépites irrésistibles. Tout ce que touchait le beatmaker se transformait en or. Il a malheureusement disparu en raison de ses addictions à la drogue qui l'ont menées à la faillite. Il est revenu tout doucement ces 4 dernières années (Look Me In My Eyes, Supreme, Forever, Sorry et Love In The 90z. La qualité était là mais pas la quantité, ni la régularité, et encore moins le succès...
Il semble que cela soit près de changer et que Russ lui donne l'opportunité de remettre un pied à l'étrier en confiant la production de 4 chansons à un tiers. Non seulement c'est une grande première pour lui et son choix se porte sur un revenant qu'on croyait quasi-disparu, mais en plus leurs styles musicaux sont radicalement différents, rendant cette collaboration d'autant plus étonnante. Mais aussi très excitante sachant leurs talents respectifs. Alors qu'en est-il ?

Malheureusement, Think Twice, le premier morceau, a fait retomber toute cette excitation comme un soufflé. Non pas qu'il soit mauvais, loin de là. La production est très propre, l'instru est soignée, l'interprétation entre rap et chant est sans faille, et l'ambiance planante est agréable. Mais Russ a déjà fait mieux (moins bien aussi) et surtout plus percutant. Pire, le problème principal vient du fait qu'on ne perçoit pas le moins du monde l'investissement du "Piano Man" à la prod ce ce morceau Trap'n'B. Difficile de ne pas se sentir arnaqué et pour le moins déçu.

La déconvenue est heureusement de courte durée, bien vite effacée par Prosper. On y retrouve exactement ce qu'on attendait : l'univers de Russ, avec sa douce mélancolie joliment chantée dans les refrains et ses couplets rap percutants, sur une instru immédiatement accrocheuse grâce à la touche magique de Scott Storch avec son incontournable piano et ses basses typiques qui l'accompagnent avec brio et donne une touche Hip-Hop toujours des plus séduisantes.

Le plaisir continue avec Maybe, un peu moins conventionnel pour du Scott Storch, qui semble avoir carrément fusionné son style d'instru avec celui de son interprète. La joyeuse mélancolie qui caractérise Russ habite aussi l'instrumentale pour un résultat captivant, aussi accrocheur qu'émouvant. Difficile de dire ce qui est le meilleur dans cette fabuleuse chanson, mais on ne pourra s'empêcher de souligner l'irrésistible mélodie du refrain aussi ravissant que catchy et l'instru tout en finesse absolument adorable aux fines influences orientales.

Enfin, Wife You Up enchante avec son côté R&B reposant et chaleureux, et sa production impeccable, achevant à la perfection ce génial triplé.