22 sept. 2013

Drake - Nothing Was The Same [Album Review] [Chronique]



Près de deux ans après son deuxième album Take Care couronné d'un grand succès amplement mérité - aussi bien du côté des critiques que des ventes qui furent excellentes - Drake nous livre ce mois-ci son successeur tant attendu. Nothing Was The Same a leaké sur le net depuis Lundi, mais je me devais de résister tant que je n'avais pas le CD entre les mains. Heureusement, je n'ai pas eu besoin d'attendre le 23 Septembre pour l'écouter.

Le canadien a mis la barre très haut avec Take Care et j'attends de toute façon toujours beaucoup de mon rappeur/chanteur préféré. Alors je craignais forcément d'être déçue par ce troisième album. Aussi, je m'étais déjà préparée à lui pardonner si la qualité était un peu plus aléatoire que celle de son prédécesseur. Est-ce parce que j'étais dans cet optique que j'ai adoré cet album dès la première écoute ? Je ne crois pas.
Certes, on a coutume de dire que l'on est plus indulgent avec les artistes dont on est fan, que l'on ne voit chez eux que le meilleur et que l'on est toujours prêt à leur pardonner le moindre écart. D'ailleurs, ne dit-on pas que l'amour rend aveugle ? Toutefois, il est en réalité aisé d'avoir des attentes d'autant plus élevées que l'on apprécie un artiste. Et c'est clairement mon cas.

Alors quel soulagement de ne ressentir aucune déception à l'écoute de NWTS ! Je le trouve excellent, jusque dans sa magnifique pochette, joliment inspirée de travaux du talentueux peintre belge Magritte.
Lors de la première écoute, il m'a même fallu vérifier qu'il ne faisait pas qu'une quarantaine de minutes à tel point je n'ai pas vu passer les 60 minutes qu'il dure.
Il n'est pas aussi homogène que Take Care, il est plus varié, mais il a une réelle cohérence. La plupart des morceaux s'enchaînent bien et les productions sont abouties. L'ensemble est toujours aussi unique en son genre et s'écoute vraiment bien. On sent le style de Drake sur chaque track. Il a d'ailleurs eu l'excellente idée de confier la quasi-totalité de la prod au fidèle Noah "40" Shebib avec qui il a depuis toujours une complémentarité sans faille.

Mais que vaut cet album dans le détail ?



Nothing Was The Same commence par un titre exclusivement rappé auquel la production bien travaillée donne toute sa force : Tuscan Leather. Il n'y avait pas meilleure façon pour Drake de débuter son album et d'annoncer son retour en force.

S'en suit Furthest Thing, un joli titre en deux parties, tout d'abord doux calme et aérien, puis plus orienté Hip-Hop. Le changement d'ambiance s'opère en douceur peu avant la 3ème minute. Plus courte (moins d'une minute et demi), la deuxième partie est dotée d'influences Soul épiques qui caractérisent une majorité des  productions de Jake One (que l'on retrouve aux manettes).

Après cette introduction tout à fait plaisante, on entre en terrain connu puisque la track #3 n'est autre que Stated From The Bottom. Nous ne reviendrons donc pas sur ce banger dont j'avais à tord (quelques jours seulement) sous-estimé le potentiel, et qui a aisément cartonné cet l'hiver, lançant très bien l'ère NWTS. Notons tout de même qu'il s'intègre mieux que je l'aurais pensé dans l'album.

Ainsi, c'est donc de façon tout à fait naturelle que l'on enchaine sur un autre titre assez froid mais aux basses un peu moins marquées et à l'ambiance beaucoup plus mélancolique. Il s'agit du l'extrait qui a fait un gros buzz il y a une semaine car il sample It's Yourz du Wu-Tang Clan : Wu-Tang Forever. Inutile de polémiquer sur le bien-fondé de ce morceau puisque les membres du Wu eux-mêmes ne sont pas du même avis. Tandis que U-God et Raekwon sont honorés de l'hommage de Drake, Inspectah Deck est beaucoup plus critique, estimant après écoute que le morceau n'est pas un hommage et ne devrait pas s'intituler ainsi. Il est vrai que le résultat final est très loin du son Wu-Tang, le sample étant d'ailleurs peu marqué. C'est cependant l'un des plus beaux morceaux de NWTS, très abouti, particulièrement plaisant à écouter. Et n'est-ce pas là tout ce qui compte ? En fait, le problème réside surement dans le fait que ce son est très fidèle à Drake. Trop semble-t-il. Mais ça n'en reste pas moins l'hommage d'un jeune homme admirant sincèrement le groupe. Voilà sans doute pourquoi l’inévitable controverse n'a pas empêché certains des membres du Wu d'enregistrer un remix du titre avec Noah Shebib. Mais cela est une autre histoire puisqu'à l'heure actuelle, on ne sait pas encore ce qu'il en adviendra.

Revenons donc à l'album. Continuant sur sa lancée, Drizzy utilise peu ou prou la même recette que sur Wu-Tang Forever pour Own It, mais en incorporant quelques éléments Chopped and Screwed. Pratique relativement inhabituelle chez lui, mais qui rend très bien.

Après cette pause calme avec son atmosphère ouatée propre à Noah "40", on bascule assez naturellement sur un titre aux basses très marquées, avec un refrain rappé très addictif. On doit Worst Behavior à DJ Dahi, avec qui Drake n'avait encore jamais collaboré, mais qui a su lui offrir un son à sa mesure, qui lui corresponde parfaitement, tout en lui permettant d'innover. Un des meilleurs moments de l'album. J'ai l'impression que je vais revenir souvent dessus.

Passé ce banger en puissance, une pause est la bienvenue et c'est la charmante Jhené Aiko qui nous offre cette oasis de douceur et de calme dont elle a le secret. La chanson s'intitule From Time et rencontre déjà une approbation sans faille. Avec des univers si proches et complémentaires, cette association des deux artistes est tellement évidente qu'on se demande pourquoi elle n'a pas eu lieu avant. Cela serait oublier que Drizzy avait posé sur July, un extrait de l'excellente mixtape Sailing Soul(s) de la chanteuse, il y a 3 ans.

Il est maintenant tant de se réveiller un peu. Le single Hold On, Coming Home arrive alors. Ici, pas question de Rap, Drake se contente exclusivement du chant. Mais avec son talent habituel, il insuffle comme toujours une dose de mélancolie et un côté aérien à ce morceau plus accrocheur et addictif qu'il n'y paraissait au premier abord. Il parvient à s'approprier ce style aux influences Pop 80's pour en faire une chanson finalement bien plus proche de son style qu'il n'y semblait au départ. Là est toute sa force.

Intervient ensuite un titre légèrement moins marquant aux premières notes, Connect, mais qui devient vite tellement agréable tant il ne cesse d'évoluer positivement au fil des 5 minutes de sa durée. Ici, c'est le Drake chanteur mélancolique que l'on a toujours connu. Mention spéciale à l'adorable instru du bridge, très originale, à la fois inattendue et très bien intégrée.

Après tant de beauté, il semble qu'il fallait bien quelques petits défauts à cet album et les trois morceaux suivants vont nous les apporter...
Plus minimaliste, plus sombre, The Language est moins plaisant. Le refrain chanté vient adoucir l’atmosphère un peu oppressante qui s'en dégage mais sans parvenir à vraiment doper l’intérêt général du son. Mais attention, il n'est ni mauvais, ni désagréable, seulement moins enthousiasmant, moins classe que toutes les chansons qui le précèdent. Il est plus typé mixtape. Le couplet de Birdman - non crédité en tant que featuring - renforce d'ailleurs cette impression, en plus d'être inutile. Mais YMCMB oblige, il fallait faire une petite place au boss...
S'arrêtant net sur cette intervention, il fait place à 305 To My City, qui continue de faire baisser la qualité du projet pourtant si élevée au départ. En effet, c'est pour moi, le plus mauvais titre de l'opus. Brouillon, ennuyeux, avec une instru pesante, et des backgrounds vocals dispensables, il semble beaucoup moins abouti.

C'est donc avec plaisir que le morceau suivant offre une bouffée d'air frais après cette ambiance lourde. Ce n'est cependant pas une grande réussite, contrairement à ce que l'on pouvait lire un peu partout en commentaire de son premier live de la chanson. Cela tient notamment à sa construction axée sur des couplets rap trop nettement différenciés des refrains chantés. Dépouillés, ceux-ci sont plutôt ennuyeux et finalement assez superflus, en plus de ne même pas être interprétés par Drake, alors qu'il s'en chargerait 1000 fois mieux que Sampha. On est, selon moi, un peu trop loin de l'univers du canadien, dans un style plus ordinaire et prévisible, alors qu'il vaut mieux que cela.

Passées ces trois tracks décevantes, l'album se conclu heureusement de meilleure façon avec une outro en deux parties : Pound Cake/Paris Morton Music 2.
Le monde entier a parlé du sample de It's Yourz sur Wu-Tang Forever mais ce n'est pas la seule track qui sample le Wu-Tang Clan. Ainsi, la première partie de ce titre clôturant l'édition standard de l'opus sample la ligne phare de leur méga-hit C.R.E.A.M., couplée à l'utilisation d'un sample d'une chanson de l'anglaise Ellie Goulding (Don't Say A Word). Deux univers totalement différents que seul Drake parvient à dompter pour en créer un nouveau, le sien. A tel point que la présence de Jay-Z n'était pas forcément nécessaire, bien qu'il n'y ait évidemment rien à lui reprocher : il assure avec tout le talent qu'on lui connait. Après Light Up sur Thank Me Later, c'est d'ailleurs un gage de reconnaissance qu'il fait à Drizzy en figurant une deuxième fois sur l'un de ses albums.
Suite à cette première partie, Drake reprend la main pour Paris Morton Music 2. Difficile pour moi d'y voir la parenté annoncée avec l'excellent Aston Martin Music, donc je reste sur ma faim. D'autant que cette suite relativement fade ne s'avère pas indispensable. Un bon titre de remplissage, mais pas une outro. Il aurait peut-être mieux valu conclure sur Pound Cake.

Mais quelle importance après tout, puisqu'il reste encore les bonus ?
Au nombre de deux sur l'édition deluxe, ce sont Come Thru et All Me.
Exclusivement produit par Noah Shebib, le premier est du pur Drake, entre chant et rap, comme il nous gratifie depuis ses débuts. Rien à redire, il suffit d'apprécier cette constante de sa carrière.
Quant au second, on le connait déjà depuis plus d'un mois puisqu'il fut un temps annoncé comme single. Comme pour le premier single, j'ai mis quelques petits jours à adhérer mais je dois avouer que je l'apprécie désormais malgré ses défauts. J'en viens à regretter qu'il ne soit pas présent sur l'édition standard. Il y a aurait eu toute sa place, avant Started From The Bottom par exemple, ou vers la fin de l'album.

Enfin, last but not the least, l'édition Best Buy se voit munie d'un bonus supplémentaire : l'excellent The Motion. Quel dommage qu'il ne bénéficie pas d'un meilleur traitement ! Il méritait pourtant une place de choix sur l'édition standard. Sa qualité et son originalité définissent parfaitement l'opus.



Malgré quelques imperfections ou frustrations, Nothing Was The Same est un album de grande qualité, notamment dans sa première partie. Les 9 premières tracks sont tout simplement excellentes. Les autres demandent peut-être demandent plus de temps pour être apprivoisées. En fait, outre le choix discutable de placer certains titres en tant que vulgaires bonus, le défaut majeur de l'opus tient aux derniers morceaux qui tendent à ternir l'image globale de l'album, partie de tellement haut. Dispensables ou pas, il est surtout dommage d'avoir placé tous les moins bons morceaux à la fin car ils laissent indubitablement un petit goût amer.
Mais cela ne suffit pas à détruire un album aussi réussi, qui donne autant de plaisir à l'écoute. Et cela saute aux yeux dès la première écoute, pour se confirmer et même se renforcer avec les suivantes.
Mélange de souvenirs, d'innovations et d'influences variées, Nothing Was The Same témoigne de la capacité d'un artiste au sommet à ne pas s'endormir et à livrer un troisième album aussi bon que le deuxième avec lequel il devient finalement vain de continuer les comparaisons, tous deux étant d'excellente facture.
Bref, Drake se renouvèle tout en se restant fidèle. Cela semble être le mot d'ordre de cet album. Et c'est bien là sa force, car voilà ce que l'on demande à un artiste.

Ah, j'allais oublier une dernière chose : achetez-le vite !!

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